Les assurances de dommages resteront déficitaires en 2012

Quel regard portez-vous sur les premiers chiffres de la sinistralité automobile et multirisques habitation en 2012 ?

L’activité d’assurance automobile et multirisques habitation sur les huit premiers mois de l’année présente une double tendance : d’un côté une diminution de la fréquence des sinistres et de l’autre une augmentation du coût moyen des indemnisations et ce, de manière très marquée dans certaines branches d’activité.

Au global, malgré des chiffres d’affaires en augmentation pour l’année 2012, ces deux activités enregistreront vraisemblablement en fin d’année un déficit du point de vue strictement technique.

Selon vous, quel sera l’impact de la sinistralité automobile sur les tarifs ?

Il est important de rappeler que le marché français de l’assurance automobile est le marché le plus concurrentiel d’Europe, comme l’a souligné l’autorité de la concurrence dans son dernier rapport. La fixation des tarifs relève de la responsabilité de chaque acteur, mais on peut toutefois penser que, dans ce contexte concurrentiel, les sociétés d’assurances auront à cœur de minimiser les conséquences de cette sinistralité.

Quels seront les événements marquants en 2013 en matière d’assurance automobile ?

La fin de la segmentation homme/femme est le premier point impactant fortement la branche d’assurance automobile. Les statistiques nous ont montré que c’est dans les deux ans qui suivent l’obtention du permis de conduire que les différences de sinistralité sont les plus fortes entre les hommes et les femmes. Or, à partir du 21 décembre 2012 et sur décision de la Cour de Justice Européenne, les assureurs ne pourront plus utiliser le critère du genre pour ajuster leurs grilles tarifaires. Les jeunes conductrices risquent notamment de se voir pénalisées.

Le second fait marquant est le transfert de la revalorisation des rentes corporelles du FGAO vers les assureurs. À compter du 1er janvier 2013, les assureurs pourraient avoir à prendre en charge cette nouvelle mission. Nous avons dit que nous étions prêts à le faire dans un contexte d’inflation « normale » et la FFSA a demandé aux pouvoirs publics que cet engagement soit capé, c’est-à-dire qu’au-delà d’un certain niveau d’inflation, cette surcharge « anormale » ne soit plus du ressort des assureurs.

Contrairement aux années passées, 2012 n’a pas connu de catastrophe naturelle majeure. Cela se ressent-il sur les chiffres que vous constatez ?

N’oublions pas que l’année n’est pas terminée, comme viennent de nous le rappeler les récents événements climatiques ! Nous avons subi une vague de froid sans précédent au mois de février. Cet événement a eu pour conséquence une très forte hausse des dégâts des eaux imputables au gel faisant rompre un grand nombre de canalisations. Les indemnisations des assureurs se sont élevées à 500 millions d’euros, ce qui est comparable au coût d’une catastrophe naturelle significative. Nous avons également constaté une situation paradoxale en termes d’incendie avec une baisse du nombre d’événements et une hausse des montants versés. Là encore, on constate que la vague de froid du début d’année a généré une utilisation accrue et mal maîtrisée des moyens de chauffage, provoquant de lourds sinistres pouvant atteindre plus de 100 000 euros.

Que pensez-vous des propositions du Sénat suite aux inondations du Var ?

Concernant la proposition d’obligation d’assurance en habitation, si elle part d’un souci légitime d’accroître les ressources du régime des catastrophes naturelles, nous pensons qu’il s’agit d’une solution disproportionnée eu égard à ce que l’on peut en attendre. Plus de 95 % des habitations sont déjà assurées aujourd’hui. L’obligation d’assurance existe déjà pour les locataires. Nous estimons qu’une obligation d’assurance ne se justifie que lorsque l’absence d’assurance met en péril un tiers victime.

Sur le Fonds Barnier, le rapport souligne l’inflation continue des missions de ce fonds au fur et à mesure des années. Il est devenu aujourd’hui un outil de financement de la politique publique de prévention contre les risques naturels. À ce titre, nous pensons justifié d’adapter son mode de financement à cette fonction.

Enfin, sur la modulation tarifaire de l’assurance catastrophes naturelles, nous comprenons l’idée d’en faire un outil de sensibilisation des assurés à leurs expositions au risque. Néanmoins, cette sensibilisation n’aura de sens que pour les grandes entreprises. Pour les particuliers et les PME, la prévention relève avant tout d’une gestion collective et donc des politiques locales, régionales ou nationales de prévention. Sur cette population, nous restons donc attachés au maintien d’un tarif solidaire unique.

Extrait de la Lettre Assurer n°196 (31 octobre 2012)