Assurance vie : « Taxer à l’IR les versements de moins de 4 ans, une révolution »

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David Charlet, président de l’Association nationale des conseils financiers (Anacofi), juge le rapport Berger-Lefebre sur l’épargne financière timoré dans l’ensemble. Tout en pointant des propositions de changements majeurs pour les détenteurs de contrats d’assurance vie.

Toutsurlassurancevie.com : Quel est votre avis sur le rapport Berger-Lefebvre ?
David Charlet : Il s’agit d’un bon diagnostic qui ne comporte pas de surprise. C’est un rapport qui se veut consensuel : sur la forme comme sur le fond, sa rédaction montre que les deux rapporteurs ont cherché à arrondir les angles. Il traite le problème du financement de l’économie et des PME via l’épargne « à la française » : au lieu de construire un nouvel outil, il est suggéré de travailler sur les solutions existantes, au sein desquelles il est proposé de réallouer des masses de capitaux. Je fais en particulier référence à l’assurance vie. Et on ne nous dit pas précisément comment ces transferts d’épargne vont être mis en œuvre pour faire profiter de cet argent aux PME-TPE. Or l’intitulé du rapport est « Dynamiser l’épargne financière des ménages pour financer l’investissement et la compétitivité ».

En quoi l’absence de propositions portant sur la construction de nouvelles solutions d’épargne est-elle gênante pour vous ?
La pratique quotidienne de nos métiers, essentiellement de conseil en gestion de patrimoine (CGP), en investissements financiers (CIF), de courtiers en assurance-vie ou en produits bancaires, démontre qu’il nous manque des solutions sur le marché pour tout un tas de besoins exprimés par les clients. De ce point de vue, je pense que le rapport aurait gagné à se montrer plus ambitieux dans ses propositions.

En pratique, quelles propositions sur l’assurance vie ont retenu votre attention ?
Il fallait s’attendre à ce que le rapport s’intéresse à la durée du placement pour déterminer la fiscalité applicable en cas de rachat et non plus la durée de détention du contrat comme c’est le cas actuellement. Cette idée a bel et bien été abordée de la façon suivante : « il pourra être envisagé que les produits issus de versements de moins de 4 ans soient systématiquement imposés au barème de l’impôt sur le revenu. » Le rapport énonce ainsi clairement qu’en cas de rachat, la part de produits d’un placement au sein d’une assurance vie, qu’il s’agisse de la participation aux bénéfices d’un fonds en euros ou d’une plus-value sur un support en unités de compte, n’a pas à être exonérée d’impôt sur le revenu dans les quatre premières années suivant la date du versement. C’est une révolution totale : il s’agit d’un retour à un système de calcul qui avait été abandonné il y a plus de vingt ans.

Dans quelle mesure la gestion des contrats d’assurance vie serait modifiée, en cas d’inclusion de cette disposition dans la prochaine loi de finances ?
Comprenez bien, on ne raisonnerait plus selon l’âge du contrat mais selon la durée de placement des capitaux versés. Concrètement, un contrat qui aurait 12 ans d’âge et ferait l’objet d’un versement un an avant un rachat partiel ou un rachat programmé devra faire l’objet d’une comptabilisation prorata temporis (en fonction du temps écoulé, NDLR) pour calculer la fiscalité applicable à ce rachat. C’est un moyen de rallonger la durée effective des placements des Français au travers de l’assurance vie.

Karine Berger et Dominique Lefebvre proposent également de supprimer le bénéfice du régime fiscal actuel pour les contrats investis uniquement en fonds en euros, au-delà de 500.000 euros d’encours. Qu’en pensez-vous ?
Cette disposition risque de poser quelques problèmes. Ces contrats sont souvent détenus par des personnes âgées de 70 ans ou plus. Il n’est pas certains que ces personnes aient envie de prendre des risques. On oublie également qu’il faudra modifier la loi de sorte qu’un conseiller ne soit pas en risque d’être sanctionné pour faute professionnelle lorsqu’il aura proposé à son client âgé de 75 ans de maintenir un pourcentage de détention d’actions significatif dans l’allocation de son contrat d’assurance vie.

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