PLFSS

Parole d’experts – PLFSS pour 2019 – Octobre 2018

Un menu appétissant qui laisse sur sa faim…

PLFSS 2019 : Ce qui doit changer. Frais de santé : les nouveaux chantiers. Quels impacts sur les charges sociales ?

Présenté en grande pompe comme le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) qui prévoit le retour à l’équilibre de la Sécurité sociale après dix-huit années de déficit, ce texte, discuté en séance publique à l’Assemblée nationale à partir du 23 octobre 2018, intéressera principalement les entreprises en ce qu’il modifie, une fois n’est pas coutume, l’assiette de leurs charges sociales (1) et leurs complémentaires santé (2).

Sans en faire une liste à la Prévert, reprenons ici, pour chacun de ces deux axes, les mesures les plus significatives.

1. Charges sociales : nouvelles diminutions et aménagements en matière de contrôle « URSSAF »

Les réformes phares mises en avant par le Gouvernement concernent le coût du travail et portent avant tout sur la réduction de cotisations salariales assises sur la rémunération des heures supplémentaires à compter du 1er septembre 2019 (article 7) et sur la transformation du CICE et du CITS en allègements de charges patronales (article 8).

Sur ce dernier point pourtant, le projet n’améliore pas le dispositif, déjà intégralement organisé par la LFSS pour 2018 et reporte en fait sa date d’entrée en vigueur définitive. Ainsi, l’allègement de 6 % des cotisations patronales d’assurance maladie pour les salariés dont la rémunération n’excède pas 2,5 fois le SMIC, et l’extension de la réduction « Fillon » aux cotisations de retraite complémentaire (lesquelles vont d’ailleurs augmenter avec la fusion AGIRC-ARRCO), ne sont pas modifiés.

Le projet de texte comporte en outre quelques mesures d’aménagement bienvenues de la procédure de contrôle « URSSAF ».

Ces mesures entrent donc en vigueur, comme prévu, au 1er janvier 2019. En revanche l’extension de la réduction aux contributions d’assurance chômage est reportée au 1er octobre 2019.


Ainsi en est-il :

  • De la modulation des sanctions en cas de travail dissimulé (article 17) : comme le plafonnement de la suppression de certaines exonérations ou encore, la réduction du montant de la majoration spécifique en cas de paiement volontaire et rapide des sommes réclamées ;
  • De la possibilité pour l’URSSAF d’envoyer la mise en demeure par tout moyen donnant date certaine à sa réception (article 13) : alors même que cette possibilité existait déjà depuis quelques années pour les étapes préalables de la procédure de contrôle, comme l’envoi de la lettre d’observations, les URSSAF n’y avaient que très peu recours, voire pas du tout, le recours aux moyens électroniques n’étant manifestement pas encore appréhendé et généralisé par ces administrations ;
  • De la faculté dorénavant offerte à l’employeur de conserver les pièces justificatives de sa paie sur support informatique (article 13). On notera toutefois, sur ce dernier point, la création d’une durée légale de conservation de ces documents fixée à six ans minimum, alors même que les délais de prescription des actions correspondantes ne peuvent jamais excéder quatre ans. Cela conforte donc la jurisprudence selon laquelle les inspecteurs URSSAF sont légitimes à solliciter, lors de leur contrôle, des pièces datant de périodes antérieures aux exercices contrôlés.

2. Frais de santé : les nouveaux chantiers

Le Gouvernement entend améliorer l’accès aux soins, principalement au moyen de la création du panier « 100 % santé », également connu sous le nom de « reste à charge zéro » (article 33), de la fusion de l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) et de la

CMU-complémentaire (CMU-C) (article 34), ainsi que de l’instauration de nouveaux modes de financement (article 12).

2.1. Le panier « 100 % santé »

Il faut reconnaitre que le dispositif envisagé est séduisant en ce que tous les maillons de la chaîne d’accès aux soins sont pris en compte, impliqués, et voient leur activité encadrée : l’assurance maladie, d’abord, par une prise en charge renforcée de certains produits, les complémentaires santé, ensuite, par la modification du cahier des charges des contrats responsables, mais également les fabricants et distributeurs de produits et prestations de santé (opticiens, dentistes, etc…) par l’encadrement de leurs tarifs et de leurs offres, ainsi que leur participation à un dispositif d’évaluation du système.

Et tout cela dans la poursuite d’un objectif unique : permettre aux patients de disposer d’équipements et de prestations de qualité, aux tarifs règlementés, sans supporter aucun reste à charge. Plusieurs dizaines d’années après les médicaments et les médecins, est ainsi créé le nouveau « secteur 1 » du dentaire, de l’optique et de l’audiologie, postes de dépense pour lesquels le reste à charge est traditionnellement l’un des plus élevés.

Une fois ces premières lignes esquissées, difficile d’en finaliser les traits avec précision. D’autant plus s’agissant des dispositions propres au cahier des charges des contrats responsables, qui demeurent particulièrement pauvres. En réalité, le projet de texte ne contient que deux mesures sur ce point : d’une part, rendre obligatoire la prise en charge des frais relatifs aux soins dentaires prothétiques ou d’orthopédie dentofaciale et aux dispositifs d’optique médicale et, d’autre part, y ajouter les aides auditives. Au-delà de ces principes généraux, rien ! Les montants des nouveaux planchers de prise en charge requis, censés traduire les arbitrages réalisés en concertation avec les professionnels du secteur au cours de l’année, seront quant à eux fixés par un prochain décret. Certes, c’est là une procédure classique, sans surprise, conforme aux rôles respectifs des pouvoirs législatif et règlementaire, ayant déjà été retenue par le passé à la création, puis à chaque modification, du cahier des charges des contrats responsables.

Bien plus étonnantes en revanche sont les modalités d’entrée en vigueur de la réforme. L’existence d’une période transitoire paraissait incontournable, non seulement eu égard à l’ampleur du chantier de mise en conformité qui attend les différents acteurs que sont les organismes assureurs, les partenaires sociaux des branches professionnelles et les entreprises (mais aussi, avouons-le parce que l’habitude, bonne ou mauvaise, a ainsi été prise). Quelle surprise de voir annoncer que les nouvelles dispositions relatives au cahier des charges des contrats responsables s’appliquent aux contrats souscrits ou renouvelés à compter du 1er janvier 2020, et ce sans exception pour les couvertures collectives d’entreprise notamment ! Ce délai d’un an maximum semble d’autant plus insuffisant que la mise en oeuvre de ces mesures suppose de disposer du décret d’application, non connu à ce jour.

Dans son avis de début octobre, l’UNOCAM appelle en conséquence les URSSAF à la plus grande bienveillance dans l’application de cette réforme jusqu’au 1er janvier 2021. Sera-t-elle entendue ?

Il faut l’espérer, car cette nouvelle modification du cahier des charges des contrats responsables est d’autant plus lourde de conséquences pour les entreprises qu’outre les incidences sociales et fiscales habituelles, elle rehausse automatiquement le niveau du « panier de soins légal », de par l’obligation de droit du travail faite aux employeurs de proposer des couvertures minimales « responsables ». S’il en résulte que la réforme est pratiquement sans incidence pour les couvertures les plus généreuses (voire, pourrait en diminuer le tarif du fait de la diminution du coût de certaines prestations), il faut en revanche s’attendre inévitablement à une augmentation du tarif des couvertures d’entrée de gamme, ce qui impliquera forcément de nouvelles négociations tarifaires entre entreprises et organismes assureurs.

Corrélativement, la grande inconnue demeure la tarification des nouvelles offres « 100 % santé », dans la mesure où nul ne peut prédire la future consommation à laquelle donneront lieu des actes qui n’existent pas encore ! Incertitude, qui plus est, nourrie de l’appréhension légitime des services de gestion confrontés à l’inévitable et complexe mise en conformité avec les nouvelles codifications des actes médicaux…

2.2. La fusion des dispositifs ACS et CMU-C

L’enjeu affiché est simple : il s’agit de lutter contre le faible recours au dispositif de l’ACS, jugé trop complexe et, de fait, demandé par moins de la moitié des bénéficiaires éligibles. Le dispositif disparaît donc à compter du 1er novembre 2019, au profit d’une CMU-C élargie, qui s’y substitue. La CMU-C, dont les modalités de fonctionnement restent les mêmes, aura désormais vocation à bénéficier, d’une part, à titre gratuit, au public éligible à la CMU-C ancienne formule, et d’autre part, moyennant une participation financière, au public actuellement éligible à l’ACS.

Les plafonds de ressources constituant actuellement les seuils d’accès à ces deux dispositifs n’ont pas vocation à être modifiés pour autant.

Si, comme auparavant, la gestion de la CMU-C pourra être confiée, au choix de chaque bénéficiaire, à une caisse d’assurance maladie ou à un organisme assureur, cette évolution n’est pas du goût des organismes complémentaires qui redoutent la mainmise de la Sécurité sociale sur le nouveau dispositif et les conditions de leur rémunération en tant que gestionnaires de ces contrats.

2.3. Une nouvelle taxe sur les contrats frais de santé ?

Notons enfin que le projet pérennise le financement de l’un des éléments de rémunération des médecins, le « forfait patientèle ». Depuis 2014, cette contribution a été mise à la charge des organismes d’assurance maladie complémentaire au sein des LFSS successives pour des durées déterminées et était égale, en dernier lieu, pour 2018, à 8,10 € par le nombre d’assurés hors CMU-C ayant consulté son médecin traitant au cours de l’année 2017. Une nouvelle contribution, désormais codifiée et donc pérenne, vient prendre la suite pour un taux de 0,8 % du chiffre d’affaires santé dans les mêmes conditions d’assiette et de recouvrement que la taxe de solidarité additionnelle (TSA) (article 12). Si cette modification est censée augmenter le rendement de la contribution, difficile d’y voir une charge financière entièrement nouvelle pour les organismes assureurs. Pour autant, ne serait-il pas tentant d’annoncer, purement et simplement, une hausse de 0,8 % des tarifs santé ? Il conviendra d’être vigilant sur ce point. À bon entendeur.

Ce projet de texte, en l’état, laisse un peu son lecteur sur sa faim. Pour autant, devons-nous nous plaindre que, pour une fois, le droit positif ne soit pas complètement chamboulé par de nouvelles dispositions ? Cela laissera peut-être un peu de repos et de temps pour digérer les réformes passées, et à venir, d’autant que des chantiers majeurs frappent déjà à la porte de l’année 2019 dans le sillage de la loi « PACTE » et de la refonte de tous les dispositifs d’épargne retraite.

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Charlotte Bertrand
Avocate Associée, Cabinet Fromont Briens
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PLFSS 2015 : Le Sénat adopte la taxe additionnelle sur les retraites chapeau

Senat-ParlementPLFSS 2015 : Le Sénat adopte la taxe additionnelle sur les retraites chapeau

Le Sénat a adopté le PLFSS 2015 en nouvelle lecture jeudi 27 novembre et notamment l’amendement prévoyant la taxe additionnelle sur les retraites chapeau.

“L’affaire Gérard Mestrallet”, PDG de GDF-Suez et ses 831.641 euros annuels accordés en guise de retraite sur-complémentaire avait fait grand bruit. La question des retraites chapeau était alors revenue sur le devant de la scène. A cette occasion, Emmanuel Macron avait annoncé que la volonté du gouvernement était de les supprimer purement et simplement.

En attendant le passage à l’acte, le Sénat avait intégré un amendement dans le PLFSS 2015 visant à alourdir la fiscalité sur les retraites chapeau dépassant 8 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 300.384 euros. Auparavant à 30%, la taxe serait désormais fixée à 45% à la charge de l’employeur.

Adopté par l’Assemblée nationale, cet amendement a été une nouvelle fois adopté par le Sénat en nouvelle lecture jeudi 27 novembre. Avec ce texte, le Parlement espère limiter “les dérapages” qui défraient régulièrement la chronique.

Pour rappel, le secteur de l’assurance intervient dans le financement des retraites sur-complémentaires. Le marché représente 7Mds d’euros de prestations en 2013 selon la FFSA. Pas sûr toutefois que cet amendement pèse sur les résultats du secteur, puisque plus de la moitié des salariés concernés bénéficie d’une rente ne dépassant pas les 2.000 euros annuels. Bien loin du plafond prévu par le PLFSS.


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